Les destinées de la cinquième race

Les destinées de la cinquième race, la nôtre, sont marquées par le symbolisme du Dieu Brahma. Il tira de sa tête les sages brahmanes, de sa poitrine les vaillants ksha­tryas, de son ventre les Vyasas industrieux, de ses pieds les Sudras travailleurs.

Ces quatre règneront successivement sur la Terre. D’abord les sages gouverneront pour l’enchantement des humains. Puis les guerriers formeront d’immenses empires pleins de conquêtes et de fureur. Ensuite viendront les commerçants dont les navires et les caravanes enlaceront les peuples dans un réseau d’or. Enfin les ouvriers, les tra­vailleurs manuels, prendront le sceptre du monde.

Alors Vischnou s’incarnera sous la forme de Baouda, le génie destructeur. Il persuadera les peuples que l’Esprit suprême n’existe pas et que seule triomphe la matière aux multiples transformations. La croyance en l’éternité de l’âme sera balayée par le vent de la décrépitude. L’intelligence humaine ira décroissant comme l’eau qui s’avance dans les déserts. On étudiera les Écritures Saintes, mais dans une perspective de négation, et d’incompréhen­sion. Un lourd voile tombera sur les yeux et sur les cœurs. On remplacera l’amour par la haine, la sagesse par la folie, la beauté par l’horreur. Les fils se dresseront contre les pères ; les femmes contre les maris. Comme de petites étin­celles allument de grands incendies, les querelles s’élance­ront pour des motifs futiles. L’air sera corrompu à cause de la méchanceté et de la perversion des hommes.

L’empire de Baouda s’étendra sur le pays de Ky. D’immenses tremblements de terre secoueront la planète. La caste des travailleurs prendra comme couleur la nuance colorée des brahmanes : le rouge. Des flèches de feu tom­beront du ciel et brûleront la terre jusqu’à une profondeur de dix coudées. Trois animaux géants parcourront les peuples en creusant d’effrayants ravages : un Âne tita­nique, un Aigle démesuré, un Dragon énorme. Deux pla­nètes enverront sur les peuples des rayons maléfiques, la planète de la guerre et la planète de la mort. La conquête par l’homme de ces deux planètes de la mort marquera dans les cieux le signe de la fin des nations et des civilisa­tions. Un autre signe brillera quand les secrets de l’Inde, l’antique mère des philosophies, seront à la fois répandus sur toute la Terre, et déformés par les faux sages, qui vou­dront y puiser l’or pernicieux et le néfaste pouvoir.

Les vrais sages passeront inconnus au milieu des ignorants, qui prétendront détenir la véritable science. Un autre signe éclatera comme une comète aux feux sanglants quand la foudre tombera sur les deux tiares, celle de Lhassa et celle de Rome.

La cinquième race dominatrice des nouveaux conti­nents, s’achemine donc vers sa destruction. La mort des Dieux et la mort des hommes seront le résultat de sa science négative. Pollution et bombe nucléaire auront raison de la folie et de la violence des peuples. Les vrais prophètes prê­cheront l’ultime espérance, le végétarisme et la pensée d’amour. Espoir tremblant, feux follets sur les marécages du fatal. Si le feu follet ne sauve pas l’espèce humaine, il sauvera des milliers de prédestinés.

Mais les faux prophètes auront des disciples par cen­taines de millions. Ils diviniseront l’obéissance, la force, la mort, le néant, l’orgie. Des machines effrayantes les servi­ront. Ils mettront la main sur les énergies occultes de l’âme instinctive et magnétique. Alors viendra la fin de l’humani­té, dans la dernière guerre mondiale, au milieu des geysers de feu montant de la Terre et des fusées thermonucléaires tombant des cieux.

La carte des océans sera bouleversée. D’antiques conti­nents ressusciteront, les continents actuels s’effaceront dans l’alliance des flammes et des inondations. Des marées brûlantes effaceront les métropoles de l’orgueil humain, filles d’Ayodhya, d’Asgard, de Memphis et de Babylone.

Puis un long linceul de mille années s’étendra sur les ruines de l’univers. La vie recommencera son essor, mais dans des formes d’aberration, enfantées par l’aberration de la cinquième race. On verra des pierres vivantes, des poulpes intelligents, des arbres carnivores, des hommes-­animaux à tête de gorille. Une extraordinaire débauche de formes gonflées de folie ! Mais la race des surhommes bleus naîtra dans une étincelle de gloire.

Les surhommes qui nous remplaceront posséderont un corps ailé, de couleur azuréenne, et seront doués de pouvoirs paranormaux : télépathie, télékinésie, vision radiesthésique, clairvoyance, incombustibilité, communica­tion avec les morts. La race bleue décrira la courbe naturel­le, de l’aurore au crépuscule, et de l’essor au déclin.

Elle construira des soleils artificiels, élaborera une civi­lisation supérieure, la civilisation du Verseau, qui écartera les guerres, les révolutions, l’exploitation de l’homme par l’homme. On adorera Dieu, sans le voile trompeur des reli­gions. On vénèrera les hommes de génie. Chacun verra dans l’autre son frère et son dieu.

Mais les cycles dérouleront leur ronde inexorable. Le Krita Yuga ne dure qu’un million sept cent vingt-huit mille années. C’est la splendeur divine. Le Treta Yuga dure moins encore : à peine un million deux cent quatre-vingt-seize mille années. C’est la splendeur céleste. Le Dvapara­ Yuga s’amincit toujours : il passe en huit cent soixante-­quatre mille années. C’est la splendeur humaine. Mais le Kali Yuga, le dernier âge, se contente de quatre cent tren­te-deux mille années. C’est le règne des démons.

Alors recommenceront les abominations de l’Atlantide et d’autres pires.

 

François Brousse

La Trinosophie de l’étoile Polaire, Clamart, Éd. La Licorne Ailée, 1990, p. 105-108