L’instant bouillonne de miracles
Le prodige brille à fleur d’eau
Les saints peuplent leurs tabernacles
Des prêtres à l’air vénérable
Récitent un tendre credo.

L’Europe lentement se forme
Pierre à pierre le pur souhait
Du sage et des penseurs énormes
Dans le gai murmure des ormes
File son mystique rouet.

Des magnificences prochaines
Montrent leur fastueux profil
Les aventures surhumaines
Comblent de pélicans les chênes

Des mains brisent les sombres chaînes
Adonaï revient d’exil.

Pourtant un doute noir me ronge
Les hommes pareils aux démons
Sauront‑ils que l’amour prolonge
Au‑delà des bornes du songe
Tes maximes, ô Salomon ?

L’alcyon des paradis chante
Les peuples ne l’entendent pas
Une lassitude méchante
Attaque la barque du Dante
Connaît‑on le fond du trépas ?

Il faut étreindre les mystères
De l’impénétrable cité
Pour faire renaître Cythère.

La clé d’astres n’est plus sur Terre
Elle emplit la sérénité
Dans les Nirvanas enchantés.

17 août 1992