Ramanuja
XIe-XIIe siècle (Inde)
Une des révélations authentiques de certains occultes modernes est la réincarnation de Jésus dans le sage Ramanuja. Cet adorateur de Vishnou, ce prophète transcendant, qui vécut comme Moïse, cent vingt ans, a éclairé le XIe siècle de sa gloire métaphysique et miraculeuse.
À l’or de sa tendresse infinie, s’alliait l’acier d’une dialectique invincible. Il terrassa par la parole tous ses adversaires, couvrit le continent hindou de tendres prodiges et rentra dans la béatitude ineffable en l’an 1137, qui se raccroche à l’arcane XII, lame du sacrifice et de l’alchimie.
François Brousse
« Une erreur d’Alice Bailey : Jésus le nazoréen et ses incarnations (avril 1983) » dans Revue BMP N°67, mai 1989
Ramanuja, une réincarnation de Jésus
Ramanuja […] annonçait que l’âme était immortelle et qu’elle ne pouvait jamais disparaître, même dans le sein de Brahma. Cette âme immortelle, émanation indestructible de la divinité, se rapprochait sans cesse de la divinité, et l’adorait éternellement, mais ne perdait jamais son individualité ni sa personnalité et cela est en effet fort proche des enseignements de Jésus, de Jésus le Nazoréen. Il croyait en outre à la réincarnation et à la métempsycose, comme très probablement Jésus lorsqu’il déclarait aux pharisiens qu’ils iraient à la géhenne, qu’ils seraient jetés dans la géhenne, « un endroit où le feu ne s’éteint point et où le ver ne meurt point ». Et l’on sait actuellement que géhenna, la géhenne, était un ravin des environs de Jérusalem, où l’on jetait les bêtes crevées, c’est pourquoi il y avait toujours des bûchers qui flambaient et des vers qui grouillaient sous les carcasses. Il semble bien que ce soit une allusion très précise. Il voulait leur dire : « Si vous continuez vos actions anti-humaines, vous vous réincarnerez dans des animaux et vos charognes seront jetées dans la vallée de la mort. »
Il semblerait donc que le vrai Jésus et Ramanuja n’aient pas des idées tellement différentes.
Ramanuja a fait des miracles de toute espèce. Il était un redoutable dialecticien, environné de plus d’une féerie merveilleuse.
C’est ainsi que plusieurs de ses ennemis voulaient le tuer, car le métier de maître n’est pas très facile, et il expose à de nombreux aléas. Eh bien, plusieurs de ses ennemis voulaient le tuer, et on l’avait enfermé, cerné dans une forêt. Toutes les issues de cette forêt étaient fermées et il devait normalement être pris et tué : il rencontre dans la forêt un homme jeune, souriant, aux yeux pleins de lumière, et qui lui dit : – Viens avec moi. Il le suit et, après avoir marché quelques heures dans la nuit, le soleil se lève, son guide disparaît et il voit qu’il est dans une ville hindoue qu’il connaissait bien et qui était située à mille kilomètres de là. C’était encore un très beau miracle et l’on raconte des miracles encore plus extraordinaires.
François Brousse
Conférence « Les Maîtres de l’Aggartha », Perpignan, 31 octobre 1983
Un jour, ayant à discuter avec mille adversaires, il s’est transformé en un dragon ayant mille têtes et chacune de ces têtes répondaient aux questions des mille sectes philosophiques. Il avait probablement une puissance dialectique peu commode.
François Brousse
Conférence « La Comète de Halley », Paris, 15 janv. 1986
Devenir Un avec la divinité n’est pas se fondre dans la divinité de manière à ne plus exister personnellement.
Devenir Un avec la divinité, c’est prendre conscience que la divinité est en nous et que nous sommes une des facettes de la divinité. L’image que j’aime soutenir à ce propos, c’est l’image du diamant cosmique. Chacun de nous est une facette de ce diamant dont le rayonnement remplit les infinis. Mais lorsque nous passons dans la conscience cosmique et dans l’illumination, nous entrons au cœur même du diamant et de là, nous sommes le diamant total et nous rayonnons à travers toutes les facettes du diamant éternel. Il y a donc en quelque sorte un mélange de personnalité et en même temps d’unité. Nous sommes unis à Dieu mais nous ne nous perdons pas en Dieu. C’est une nécessité peut-être que de le savoir et j’ajoute […] qu’il y a deux écoles dans l’hindouisme : l’école de Sankarâchârya et l’école de Ramanuja. Dans l’école de Sankarâchârya, nous rentrons dans Dieu, nous devenons Dieu et nous perdons totalement notre personnalité. Dans l’école de Ramanuja nous entrons en Dieu, nous devenons Dieu mais nous restons Nous, dans le mystère de l’absolu et nous pouvons à la fois être Dieu et en même temps adorer Dieu. C’est en quelque sorte un mélange éternel d’amour et de contemplation.
François Brousse
Conférence « Les grandes religions et la future religion universelle », Perpignan, 15 déc. 1983
Deux écoles
D’après la tendance Sankaracharya lorsque je meurs, je rentre dans Dieu et je n’existe plus individuellement.
D’après la tendance Ramanuja, lorsque je meurs, lorsque mon égo meurt, j’existe toujours éternellement, car il reste en moi un égo céleste et avec cet égo céleste, je contemple l’absolu et je l’adore. L’adoration devient à ce moment‑là l’amour. L’amour et l’adoration font tomber les barrières de l’égo inférieur. Mais en adorant Dieu, je deviens lui, tout en étant différent de lui, ce qui me permet de goûter les plaisirs de l’adorateur et de l’adoré et les plaisirs de l’amour, car j’aime éternellement Dieu.
Pour aimer éternellement Dieu, il faut être deux et on arrive aussi à la fusion et à la séparation.
François Brousse
Conférence « Le Comte de Saint-Germain », Perpignan, 2 mars 1982
Ce sont les deux oppositions entre Ramanuja et Cankara. Pour Cankara, l’homme s’efface dans l’infini et n’existe plus ; tandis que pour Ramanuja, il existe toujours et il a des relations avec Dieu, des relations de plus en plus intimes et de plus en plus profonde, puissantes, mais jamais il ne se fond en lui ; il y a toujours le rapport entre l’amant et l’aimé. Il n’y a jamais confusion, ni fusion totale, sinon on n’existe plus et si on n’existe plus individuellement, tout n’est plus que duperie.
Là, je crois que c’est Ramanuja qui a raison ainsi que Jésus qui admet la même théorie et tous ceux qui admettent un personnalisme, c’est-à-dire une personnalité qui n’arrive jamais à être détruite ; elle s’unit à Dieu, mais elle n’est pas détruite. Sinon, nous ne voyons pas très bien ce que nous venons faire ici. Ce serait la même histoire que le matérialisme, on sort du néant, on s’agite pendant quelques années d’une manière absurde et on rentre ensuite dans le néant. Ici, ce serait pire ! On sortirait du néant divin, on s’agiterait pendant des millions d’années, et puis on rentrerait à nouveau dans le néant divin. À quoi servirait cette course parfaitement inutile puisque nous n’existerions plus ?
Dans la théorie des druides, de Pythagore, dans les œuvres d’Orphée et de Ramanuja, nous existons toujours. Nous deviendrons Dieu, mais en conservant notre divinité personnelle ; puis nous irons encore plus loin, tout en conservant encore notre divinité personnelle et nous ne nous arrêterons jamais ; nous ne serons jamais engloutis dans l’infini.
Évidemment, c’est l’histoire de l’infini qui nous gêne. La conception de l’infini est telle que, si l’on absorbe l’infini, il reste encore l’infini. Nous serons d’abord infiniment bons, puis infiniment heureux, puis infiniment joyeux, puis infiniment puissants, puis infiniment intelligents, et ainsi de suite sans que cela jamais ne s’arrête, parce qu’il y a une infinité de qualité en Dieu. Nous les connaîtrons les unes après les autres et, comme elles sont infinies, jamais nous n’arriverons à nous fondre entièrement en Dieu et à nous effacer intégralement.
C’est, je crois, la théorie de Hugo, celle des druides, de Ramanuja, et c’est la vraie théorie. Il peut y avoir fusion mais pas confusion !
François Brousse
Entretien, Perpignan, 3 oct. 1983
Ramanuja, un visage de Siva
D’après les hindous, Dieu a trois visages qui sont Brahma, Vishnou et Siva :
Le visage de Vishnou resplendit chez les rédempteurs comme Jésus ou Mahomet ;
Le visage de Siva s’incarne chez les grands métaphysiciens, comme Ramanuja, Sankhara ou Aurobindo ;
Le visage de Brahma étincelle dans le cœur des grands poètes inspirés.
François Brousse
« Poésie – Questions-Réponses », Paris, 22 mars 1985
N.B. : Dans un autre entretien (Perpignan, 6 janvier 1987), François Brousse considère Ramanuja comme une incarnaion de Vishnou qui « pratique surtout l’amour universel ».
Un bodhisattva
Ramanuja fait partie des êtres qui, étant réalisés, se réincarne quand même. Ils sont réalisés effectivement, c’est le phénomène des bodhisattvas.
Il y a d’un côté, le bouddha, qui reste dans la béatitude infinie, et le bodhisattva qui, tout en étant rempli de béatitude infinie, descend sur terre pour apporter aux humains un peu de la clarté éblouissante du divin.
François Brousse
Conférence « Les mondes parallèles », Paris, 18 sept. 1992